La frontière italienne

du col du Mt Cenis à l'Aiguille de Scolette

 

Les plus belles randonnées, les plus sauvages, ceux sont celles qui suivent la crête des Alpes. Et donc en général la frontière italienne (frontière lorsque nos généraux n'ont pas trop grignoté vers l'Italie en 1945, comme pour la Vallée Etroite ...). La contrainte est que souvent il n'y a pas de refuges et le bivouac est obligatoire. De plus ne pas oublier que les refuges italiens non gardés sont de principe fermés à clés.

Autour du col du Mt Cenis, on peut beaucoup rêver. Évidemment il faut faire une fois la Pointe de la Ronce (avec un bivouac).Plus loin vers le Nord, c'est Roche Melon et la traversée que j'ai décrite par ailleurs de la vallée du Ribon jusqu'à l'Albaron (avec bivouac bien sûr). La crête vers le Sud est magnifique aussi. Elle permet de faire quelques sommets (Pointe Niblé et Pointe du Sommeiller). Elle nécessite deux bivouacs et éventuellement un troisième si on arrive pas à pénétrer dans le refuge italien Scarfiotti (fermé à clés en hiver).

 

 

Le départ se fait à la Chapelle Saint Barthélémy, à coté du lac, où on peut arriver en voiture. On est à 2000m, ce qui permet de chausser immédiatement. Pour ceux qui n'aiment pas le portage, c'est un avantage certain. Surtout qu'on porte le matériel de bivouac, la nourriture pour 4 jours et bien sûr le nécessaire de sécurité (corde, ...).

Ici sur la photo, on voit Henri (mon frère), Xavier et Jean. Claude un peu en retrait était un participant des premières années. C'était en 1982 et les photos sont un peu vieilles.

De la Chapelle, on va vers le Sud Sud-Ouest, en laissant le col du Petit Mt Cenis sur la droite. Ceci permet de passer la Crête de Montiolet et de descendre facilement sur le vallon de Savine. Là il faut remettre les peaux pour monter au col de Savine.

Du col de Savines on continue à monter plein Sud, vers un refuge marqué Rifugio del Gias sur notre carte. En fait ce refuge n'existe pas vraiment et on va bivouaquer à coté des ruines. Le temps est froid, nuageux et le bivouac est un peu pénible.

Le lendemain, on continue la montée vers le Sud-Ouest. On passe le Rifugio del Vaccarone (ruines) et on rejoint le glacier dell Agnello. La Pointe Niblé est maintenant à portée, par la face Ouest, après l'avoir contourné par une baisse à 3161m.

Je ne me rappelle plus bien de ce sommet et de la descente vers le lac d'Ambin. Ce que je me rappelle, c'est le bivouac au-dessus de ce lac. Une merveille de bivouac. Un rêve de bivouac...

Il fait très beau et on trouve un endroit bien sec, au chaud. L'orientation est parfaite et va nous laisser au soleil jusque tard le soir (un peu comme le bivouac de la Pointe de la Ronce, quand on prend la peine de monter sur le glacier du Lamet à 3200m, plutôt que de bivouaquer dans l'humidité au pied de ce glacier).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La soirée sera superbe, avec le lac d'Ambin en-dessous, tout enneigé. Une de ces soirées dont on se souvient. Surtout après le premier bivouac, assez dur et froid.

Évidemment il n'y a personne. C'est la solitude garantie. Il est en effet très difficile d'arriver au lac d'Ambin par le chemin normal d'été à cause des avalanches.

 

 

La tente caractéristique de Xavier est bien installée avec vue sur le lac. Elle nous suivra, cette tente, dans beaucoup d'autres bivouacs.

Elle loge en général Xavier et Michel, plus l'invité lyonnais de service, qui peut changer chaque année.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La suite se prépare au soleil avec un petit en-cas chaud. C'est parfait. Il faut dire que le cheminement est quand même complexe. Nous envisageons le lendemain de passer la la Pointe Sommeiller De là on redescend par le même chemin pour rejoindre le col du même nom. Ce col Sommeiller permet de descendre en Italie sur le Rifugio Scarfiotti.

De ce refuge, il nous faudra repasser la frontière par le col d'Etache et le Passage du Courousset. Ce sera le moment chaud de la randonnée.

Mais pour le moment, on savoure ce bivouac au fin fond de la vallée d'Ambin, en pleine solitude, et dans un environnement qu'on oubliera pas.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le lendemain est beau et nous permet de suivre le plan prévu. Cela commence par une petite descente en-dessous du lac, afin de rejoindre le passage par les Lacs Blancs, permettant d'accéder au glacier du sommeiller Pour faire le sommet, on laisse les sacs à mi-pente et on fait un aller-retour, de façon à pouvoir ensuite rejoindre le col.

Du col Sommeiller, une descente facile nous amène sans problème au rifugio Scarfiotti. C'est un grand cirque bien enneigé et le refuge est au milieu, bien visible. Après les deux bivouacs, j'espérais bien profiter du refuge. Cependant il ne faut pas trop rêver... Le seul refuge italien que j'ai connu ouvert en hiver est le refuge Cibrario, sans doute parce-que personne n'y monte en hiver. En tout cas, celui-là était bien fermé...!

Mais nous avions vraiment envie de rentrer. On repère une petite fenêtre à l'étage, qui n'a pas de volet et qui pourrait peut-être consentir à nous laisser entrer. Il faut faire une petite escalade et finalement on y arrive. L'intérieur du refuge est parfait. Le seul ennui, c'est qu'on ne peut pas ouvrir en bas. La seule ouverture reste donc la petite fenêtre accessible par l'escalade. Nous installons une petite corde fixe pour faciliter les entrées-sorties. Ce fut une excellente nuit.

La dernière étape permet de rejoindre le coté français. Elle va nous permettre de longer l'Aiguille de Scolette (face Est) et de rejoindre Modane par l'Hortière et la Chapelle Ste Anne.

Le temps est beau (en tout cas du coté italien) et nous entamons la montée du col d'Etache, après avoir désescaladé le premier étage du refuge dans la nuit du petit matin (je connais un autre refuge où le passage dénommé "passage des chiottes" est aussi assez typique au petit matin : le refuge de Leschaux).

Après le col d'Etache, on oblique à gauche vers le Passage du Courousset. Je pensais trouver effectivement un passage, un collet, un collu au moins. Mais tout ce qu'on voit, c'est une crête avec une corniche surplombante. Nous montons (à pieds) le couloir qui a l'air le plus aimable jusqu'à un rocher en-dessous de la corniche. Là il faut bien faire quelquechose. Nous préparons donc la corde et Xavier (c'est souvent Xavier, avec son enthousiasme et sa résistance, qui attaque les passages un peu délicats...) continue vers le corniche. Si celle-ci cède, notre assurance devrait en principe le retenir.

Xavier travaille durement là haut au-dessus. On ne voit rien, seulement des morceaux de neige qui tombent. Finalement il nous appelle et on y va. En fait il a creusé un véritable tunnel dans la corniche. Un tunnel juste assez large pour faire passer d'abord les skis, puis les sacs et enfin les hommes. La sortie du tunnel débouche sur un plateau. Un grand vallon descend en pente douce. Et on trouve le mauvais temps (blizzard, neige, froid).

Malgré le mauvais temps, la descente est magnifique (1400m à skis). Dans le vallon, on surprend un renard en train d'attraper une marmotte. Le renard s'enfuit d'un coté et la marmotte de l'autre, en perdant du sang. Peut-être notre arrivée l'aura-t-elle sauvé. Il faut dire que le printemps est une période difficile pour les marmottes. Elles se réveillent et ont faim. Mais en sortant elles trouvent la neige et sont obligées d'aller loin pour trouver un peu d'herbe. Et courir dans la neige n'est pas facile. Les renards en profitent.

A partir de l'Hortière et jusqu'à la Chapelle Ste Anne (trajet à pieds en portant les skis), il pleut. Ambiance. Heureusement nous trouvons là une voiture qui veut bien nous descendre à Modane.

Cette randonnée reste une des plus jolies que j'ai faite sur la crête des Alpes et en pleine solitude (pourtant réalisée durant un pont du mois de Mai). Elle nécessite des bivouacs, mais ceux-ci valent le coup et surtout on peut trouver des endroits de rêve.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le groupe Xavier pour cette randonnée (de gauche à droite)

  • Xavier
  • Michel
  • Jean
  • Jean-Pierre (moi-même en l'occurrence)
  • Henri (mon frère)
  • Claude (participant des premières années)