De Rochemelon à l'Albaron
C'est la Maurienne, beaucoup moins fréquenté que la Vanoise. Et quand on va chercher un circuit sur la frontière italienne avec deux bivouacs nécessaires, on peut être quasi certain de l'isolement.
L'arrivée au col est facile, mais il faut bien s'enfoncer sur la droite. Du col des Alpins (3327m), on descend sur le Glacier de derrière le Clapier (tout un programme avec ce nom). La descente est magnifique en neige poudreuse.
En bas du glacier, il faut établir un deuxième bivouac. Le bivouac du Glacier de derrière le Clapier (2655m).
Au fond de la vallée, on établit le premier bivouac. Le bivouac du Ribon (2239m).
Nous étions six, avec une tente 3 places, une tente 2 places et une mono. Dans un bivouac, le moment idéal c'est le soir. Le dîner au coucher du soleil, dans un endroit bien choisi. Et avec le froid qui descend, l'instant où on se met dans son duvet, au chaud. Le plus dur c'est le matin (trop tôt le matin...). Il faut faire un petit déjeuner sous la tente. Dehors il fait froid. On mange mal...
Du bivouac du Ribon, on part sur la gauche vers le Col de l'Arcelle ou des Alpins. Il y a un seuil avec un couloir en neige assez raide à monter. On fait ça à pieds avec les crampons.
Du bivouac du Glacier de derrière le Clapier, on monte au col de l'Autaret (3072m) et on passe en Italie. De l'autre coté du col la descente nous fait amène à un lac gelé (2988m). Des militaires sont probablement passés pas là. Ils ont bivouaqué en creusant des grottes igloos dans la pente et surtout ont creusé un trou dans le lac gelé pour prendre de l'eau.
Nous en profitons bien. Quand on peut avoir de l'eau de rivière ou même de lac, c'est toujours mieux que la neige fondue qui est notre régime ordinaire.
Le temps se couvre et il faut faire attention à la navigation. Il faut garder le cap Est et ne pas trop descendre pour enfiler le vallon qui monte au Colle del Sol.
La descente du Colle del Sol est délicate par mauvais temps. Il y a des barres et il faut avoir un instinct assez sûr, parce-que les cartes italiennes (ou du moins la partie recopiée sur la carte IGN au 1/25000) sont d'une aide relative.
Au bout de la descente sur le Ghiacciaio di Berta, on arrive au refuge Cibrario. (2616m). Normalement les refuges italiens sont hermétiquement fermés à clés l'hiver. C'est une tradition, comme dans les Alpes Maritimes. Et bien celui-là est ouvert. C'est sans doute parce-que il est inaccessible en hiver d'Italie, donc pas de risque de vol.
En tout cas, trouver un bon refuge après deux nuits de bivouacs, c'est extraordinaire...! Le repas repas s'annonçait également hors du commun, avec un bon paquet de pâtes et de la sauce Buitonni laissés par le gardien depuis la fermeture à l'automne. Comme en plus, c'est un adorable refuge en bois, que nous sommes tout-à-fait seuls, qu'il y a un poêle, que la tombée du jour est magnifique avec des nuages menaçants qui jouent avec le soleil, qu'on peut faire sécher les tentes et les sacs de couchage humides, enfin c'est tout un accord de choses qui font que ce séjour dans le refuge Cibrario restera un souvenir très fort.
Rochemelon m'a toujours attiré. Cette montagne forme un coin qui avance en Italie. A tel point d'ailleurs que le sommet est italien. En fait il est italien sans doute parce-que c'est un lieu de pèlerinage pour les italiens (mais aussi pour les autochtones de la vallée de Bessans). Et la statue de la Madone au sommet regarde la plaine du Pô. Il y a une chapelle au sommet et un petit refuge, avec une vue magnifique sur la plaine du Pô.. Cela donne envie d'y coucher en hiver, mais c'est une autre histoire (voir Traversée de Rochemelon à partir du col du Mt Cenis).
Aller vers Rochemelon, ça signifie remonter toute la vallée du Ribon. Ce n'est pas rien et les seuls abris pouvaient être les cabanes de bergers, maintenant totalement en ruine ou hermétiquement fermés.
On part du Pont du Ribon, à coté de Bessans. La remontée de la vallée du Ribon, en portant les skis durant la majeure partie du trajet est longue. Mais quelle belle vallée sauvage avec d'un coté la Point de la Ronce et de l'autre le Charbonnel !
La suite de la course prévoyait une traversée par le Colerin d'Arnes et coucher au refuge Gastaldi. Ensuite notre ambition était de gravir la Petite Muraille d'Italie et de rejoindre la Selle de l'Albaron et l'Albaron.
En fait le temps incertain nous a fait peur, sachant que si le mauvais temps se lève vraiment, il est difficile de repasser en France. La décision est donc prise de repasser de l'autre coté de la frontière ce jour là, par le col d'Arnès, et de rejoindre le refuge d'Avérole pour terminer par l'Albaron. C'est dommage, parce-que je n'ai plus eu l'occasion de repasser dans ce coin et de faire la Petite Muraille d'Italie.
Le départ au petit matin du refuge Cibrario est magnifique avec le soleil qui se lève sur la plaine du Pô. C'est une longue traversée jusqu'au Colerin d'Arnès (2839m), sans difficulté, sauf la traversée du Lago della Rossa, grand lac gelé, dont nous risquons la traversée directe.
L'Albaron est une course classique et toujours magnifique. Finalement le temps est beau et nous ferons le sommet sans problème.
La descente se fera par le Glacier Supérieur du Vallonnet. A recommander. Je l'ai fait deux fois et c'est toujours splendide.
Evidemment il faut ensuite récupérer les voitures, mais on trouve toujours en montagne des gens accommodants avec des moyens de locomotion adéquates. En l'occurence, cela nous a permis de rejoindre Bessans et fermer ainsi la boucle.
La traversée du col d'Arnès (3012m) ne pose pas de problème et la descente dans le vallon étroit d'Arnès est très jolie.
On longe la Bessanèse, qui reste un bon souvenir pour moi et on débouche sur le refuge d'Avérole (2229m).
C'est dimanche et le refuge est plein de gens qui reviennent de l'Albaron et redescendent dans la vallée. Après quatre jours de solitude compléte, on retrouve la société.
Le gardien nous accueille aimablement et nous ferons honneur au diner le soir. Quand on peut, il faut en profiter..!