Etape n°5
Pointe de la Réchasse
Refuge de l'Arpont par le sentier en balcon
On rencontre au petit-déjeuner, deux dame suisses d’un certain âge, mais pleine d’entrain, qui rêvent de monter sur le glacier ; elles ont « reluqué » Jean-Pierre et son équipement et c’est ainsi que, entraînés par deux grands-mères, nous partons en direction du Pic de La Réchasse, vers 8 heures du matin…Geneviève et Jacques nous ont dit qu’ils allaient se diriger vers le refuge de l’Arpont. Je suis encore fatiguée de l’étape de la veille et je décide de ne faire que quelques pas, avec les autres, sur le chemin du glacier.
On est jeudi et, pour la première fois depuis notre départ, il fait un temps merveilleux…Nous montons très rapidement jusqu’au glacier. Cependant, lors d’un passage où le rocher est glissant, Jean pierre nous hisse avec sa corde : nos compagnes poussent de petits cris tout en se faisant tirer ! …
Il faut, maintenant, commencer la traversée du glacier et un problème se pose : nous sommes six et nous n’avons qu’une corde, qu’une paire de crampons et qu’un piolet; pour moi, le but est atteint, j’ai mis un pied sur le glacier et je décide de redescendre; l’une des grands-mères se propose de faire de même mais la seconde voudrait bien continuer. C’est donc quatre personnes qui vont s’encorder : Jean-Pierre, la vieille dame, Bernard et Claude.
Ils s’engagent donc, mais très vite, ils s’aperçoivent que « ça ne marche pas »,la vieille dame, ne se sentant pas à l’aise, abandonne ! …Et c’est ainsi que je redescendis du glacier de La Réchasse, avec deux compagnes dont l’une avait mal au genou et l’autre mal au dos (elle s’arrêtait de temps en temps, s’étendait par terre pour faire quelques mouvements d’assouplissement), mais qui trottinaient gaîment !…Elles m’ont raconté leurs exploits : la plus intrépide avait fait l’Aiguille de la Vanoise, en solitaire, à 19 ans. Maintenant, elles continuaient à marcher beaucoup, elles étaient habituées aux Grands Tours (Tour du Mont Blanc, etc…). Nous avons salué, au passage un joli petit furet qui bondissait dans la prairie.
Arrivées au refuge, mes compagnes sont immédiatement reparties, sans souffler, sur le sentier de l’Arpont.
Moi, j’ai attendu les garçons. Ils sont rentrés vers midi très contents d’avoir fait le Pic de La Réchasse, Claude, surtout se montrait enchanté car c’était ses premiers pas sur un glacier.
Sentier en balcon vers l'Arpont
Monique et Jean-Pierre
Nous prenons le repas du refuge, petite sieste, puis…nouveau départ en direction de l’Arpont. Je n’ai pas le moral, j’ai voulu en faire trop , je suis fatiguée…Nous marchons bien pendant une heure (JP se payant un petit aller-retour supplémentaire pour récupérer à F.Faure …son gant de toilette), jusqu’au moment où nous atteignons un poteau indicateur :
" Entre-Deux-Eaux Þ 30mn.
" Refuge de l’Arpont Þ 3h30
Je ne pensais pas que c’était si loin ! Je suis furieuse ! De plus, le temps se gâte, de gros nuages s’amoncellent, j’ai bien envie de descendre à Entre-deux eaux, je parlemente avec J.Pierre, Claude et Bernard se sont assis, un peu à l’écart, sans mot dire…A la remarque de J.Pierre : « si on descend, il faudra faire l’étape demain », je repars en direction de l’Arpont !…
Les autres m’emboîtent le pas et nous marcherons ainsi pendant 3h30, sans nous arrêter, sans parler, moi, précédée et suivie par mes deux gardes du corps, J.P et Bernard, le premier se retournant souvent pour voir si je suis, le second faisant bien attention d’être au moins trois pas derrière pour ne pas m’agacer…
Le temps se gâte de plus en plus : vers le milieu de l’étape, il se met à pleuvoir, le site est beau, d’une sauvagerie incroyable, nous sommes absolument seuls, comme perdus ; nous marchons sous la pluie, avec un ciel d’encre au-dessus de nos têtes et le tonnerre qui gronde…Pour mes nerfs exacerbés, c’est une vision d’apocalypse : à un certain moment, Claude qui nous a un peu distancés, se retourne et crie, je pense qu’il est devenu subitement fou, et cela ne m’étonne pas, je flotte dans un autre monde ( simplement, il nous signalait qu’il y avait des chamois, juste au-dessus de nous !). Le sentier monte peu, il franchit cependant quelques petits cols puis serpente à flan de montagne, il s’incurve dans des vallons puis ressort sur des saillies et chaque fois, le paysage change ; à un certain moment, on longe un lac très beau mais sinistre à cet instant !
Enfin, vers 6 heures du soir, nous arrivons au refuge, on ne le découvre qu’au dernier moment et on commençait à se décourager. On est content de retrouver Jacques et Geneviève, en bonne forme, maintenant ; les deux grands-mères sont là également, arrivées un peu avant nous. Moi, je suis crevée et j’ai ma petite crise de larmes ! Je ne dis pas un mot de la soirée mais je me sens bien : demain, je dois redescendre directement à Termignon (en principe avec Geneviève), j’ai atteint mon but, je suis contente…Un ombre au tableau, cependant : Geneviève ne semble pas encore bien elle-même, elle est toujours trop excitée !
Il y a pas mal de monde dans notre dortoir ! Jean Pierre en découvre un autre, immense et tout vide ! On va s’y installer JP, Claude et moi et on y passera une nuit très sereine (bien qu’on se soit fait « attraper » par la gardienne), dormant, tous les trois d’une seule traite jusqu’à 6 h du matin !