Sur les traces de François Renard : une traversée dans le Champsaur.

François Renard ne déçoit pas. Quand il parle de solitude, c'est vraiment la solitude. Et sa traversée du Champsaur, de Dormillouse à Vallouise en passant par le Jocelme, cela faisait longtemps que j'en caressais l'idée. Je voyais bien le passage par le col de Vallonpierre, mais je ne voyais pas comment boucler, pour rejoindre Vallouise. Alors quand j'ai lu son récit du passage du col du Loup de Valgaudemar, j'ai immédiatement inscrit cette traversée dans mon programme pour le prochain printemps. Rien que le nom du col faisait déjà réver : le Loup de Valgaudemar. Le cheminement par le col de Verdonne (également difficile à imaginer sur carte) était le plus qui donnait à la traversée son caractére esthétique : une directe, plutôt que le contournement du Sirac par le col de Vallonpierre.

Nous nous sommes donc retrouvés à cinq un jour de mai. Rendez-vous à la gare d'Argentière la Bessée, au petit matin. Disposant d'une voiture, nous allons jusqu'au fond du vallon de Freyssinières. Il n'y a personne, c'est un jeudi de mai. Nous montons à Dormillouse (1 heure) en portant les skis. J'avais bien sûr réservé au gîte de l'Ecole, suivant en cela les traces de François Renard. Et effectivement nous avons été excellemment reçus. Le gardien vit là toute l'année avec sa femme. Il entretient les chemins, rédige des brochures sur les balades locales, etc... Il était assez surpris de voir des skieurs, à cette époque. En hiver on fait sans doute du ski de fond : la vallée s'y prête bien, mais il ne semble pas que le coin soit très fréquenté par les randonneurs de ski de printemps. Très serviable, il nous propose d'amener notre voiture dans le vallon d'Entre-les-Aigues pour nous faciliter le retour. En fait il ne pourra la monter que sur un partie de la route, à cause des avalanches. Je lui parle du passage de François Renard. Il s'en souvient vaguement et je lui promets de lui envoyer une copie du Paris-Chamonix qui relate ce passage.

Le lendemain nous partons au petit matin (très petit ...). Le temps est beau, plein d'étoiles. Nous chaussons après une heure de marche. Le col de Freyssinières est loin, c'est une longue vallée. On pourrait imaginer de le faire en sens inverse, en descente. Arrivés au col, on aperçoit le haut des téléskis d'Orcières, mais la saison est finie et il n'y a personne.

Ensuite le col de Prelles qui ne présente pas de difficultés extroardinaires. Le départ est un peu raide, mais une fois le premier virage réussi, ça va ... Faire attention quand même à la barre en dessous. Puis le col du Cheval de Bois et la descente à skis jusqu'au refuge de Champoléon. Le temps se gate et nous aurons la pluie dans l'après-midi. Il n'y a personnes et le refuge d'hiver, en sous-sol, n'est pas très agréable.

 

Col de Frayssinières

 

 

 

 

 

 


Col de Prelles

 

Notre guide, c'est la falaise rocheuse qui descend du Pic de Malamort. En fait ce qui me préoccupe, c'est plutôt comment on passe les barres qui nous séparent du fond du vallon de Chanteloube. La carte n'indique aucune esquisse de cheminement. Mais François Renard est bien passé !... Le problème des barres rocheuses, c'est que d'en haut on ne les voit pas. En fait la descente apparaît toute belle jusqu'au fond du vallon : ça semble tout bon.

Et bien non : il faut déchanter. Surpris à la première barre, nous reprenons une traversée horizontale vers l'est, en espérant trouver un meilleur passage. Il apparaît en effet, et nous descendons jusqu'à un dernier petit mur (15m). Là on ne passe pas. En tout cas pas à skis, et à pieds l'affaire ne paraît pas simple !. Après différentes tentatives et discussions, nous décidons de tenter un petit rappel. Je rejoins l'emplacement de pose qui parait le plus évident, et là je trouve un piton avec un vieil anneau. On n'est donc pas les premiers !. C'est toujours réconfortant. Les opérations sont longues : d'abord les skis, ensuite les hommes avec les sacs. La corde a juste la longueur. Bon point pour l'équipement, mais celui-ci ne va pas jusqu'à prévoir le 8. C'est donc le rappel classique.

Et pendant tout le temps des opérations, une marmotte qui devait chercher à profiter des premières pousses d'herbe, nous surveille avec un air curieux. A mon avis, elle se fout de nous !...

En examinant la question d'en bas, il semble qu'en poussant la traversée un peu plus vers l'est, il y aurait des passages plus commodes. François Renard n'est pas très clair sur le sujet. Il a du avoir la chance de passer juste au bon endroi (à moins que ce soit lui qui ait posé le rappel le premier...).

Le vallon de la Selle, qui suit notre rappel, est très long, mais la descente se fait bien à skis. Des traversées d'avalanches sur la fin. Cette descente est sans doute impossible avant le mois de mai. On descend à skis jusqu'à Entre-les Aigues. On trouve là deux randonneurs à pieds qui viennent de Vallouise. Après une rapide enquête, il semble bien que notre voiture se trouve plus bas sur la route. Assez loin en fait, à cause des avalanches. Avec le recul, je pense que cette traversée sur 4 jours est parmi les plus belles de l'Oisans. Elle est esthétique et présente une sauvagerie réelle, avec des passages intéressants et des magnifiques descentes.

 

Le troisième jour, c'est le passage par le col de Verdonne. Le temps est incertain, avec un peu de neige fraiche. Il faut monter au fond du vallon de la Pierre et traverser au-dessus des barres rocheuses pour rejoindre le glacier de la Pierre, au pied du col du Loup de Champoléon. Le début de la traversée est un peu délicate, avec la neige fraiche. Le temps se bouche et sur le glacier de la Pierre, nous nous arrétons souvent pour nous positionner. Finalement le couloir de la neige du col de Verdonne arrive tout naturellement. Un couloir bien étroit, mais qui se monte à pied facilement. L'arrivée au col est magnifique. Un col tout étroit où on a à peine la place de se tenir. De l'autre coté, ça descend bien. La neige est profonde (orienté nord) et nous commençons à pied. On chaussera un peu plus bas, pour réaliser une superbe descente sur le refuge de Chabourneou. La partie basse du glacier de Chabournéou se passe sans problème sur la rive droite. Au refuge de Chabourneou, nous retrouvons la société humaine. C'est la voie classique du Jocelme, et beaucoup de monde arrive le soir (certains en pleine nuit, après s'être perdus je ne sais où), mais pas le gardien.

Le lendemain, le temps est gris. Tout le monde part, mais je pressens que le Jocelme nous sera interdit. La décision est prise au pied de l'arète sud du Pic de Bonvoisin, sur le glacier de Surette. C'est trop bouché, on quitte la caravane qui continue vers le Jocelme et on part à droite vers le col du Loup de Valgaudemar (3 145m). Superbe col, sauvage. Il y a du brouillard et on voit difficilement la descente de l'autre coté. On distingue un couloir raide, sans bien voir le bout. Hésitations. A skis ou à pieds ?. Après une première tentative, je reviens en arrière pour déchausser. Je ne le sens pas bien. En fait la descente ne pose aucun problème et nous chaussons tout-de-suite en-dessous du col. Descente excellente dans une neige déjà transformée. Tout le problème c'est le repérage dans le brouillard.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Merci à François Renard pour l'idée !.